Luc Chapitre 5

Jésus appelle ses premiers disciples (5,1-11)
Pressé par la foule, Jésus a besoin d’être aidé. C’est important car il faut que le filet de la Parole atteigne tous les hommes. Cette aide, il va la demander aux pêcheurs qui ont mis leurs barques à sa disposition. Il va d’abord les inviter à avancer au large et de jeter leurs filets pour prendre du poisson.

Simon qui avait peiné toute la nuit sans rien prendre répond à l’invitation du Maître : « Sur ta parole, je vais jeter les filets. » Simon joue gros sur la Parole de Jésus. Il joue son avenir mais il ne le sait pas encore. Un seul geste exécuté à la demande du Seigneur et le résultat est inespéré. Il doit même demander à ses compagnons de l’autre barque de venir l’aider sinon cette pêche extraordinaire aurait été perdue.

Aujourd’hui comme autrefois, le Christ nous invite à avancer au large. Comme Pierre, nous n’avons peut-être pas envie de quitter la rive de nos habitudes, le sol ferme de nos certitudes. Comme Pierre, nous avons peiné des mois et des années sans grand résultat. Nous nous sommes engagés dans nos paroisses, nos quartiers, nos lieux de travail et de loisirs. Mais nous constatons que nos églises se vident ; la plupart des jeunes n’y mettent plus les pieds. Nos petits-enfants ne sont pas baptisés. Alors, on se dit qu’il faut s’organiser pour sauver ce qui peut l’être. On ne pense qu’à se protéger d’un monde qui nous ignore, nous ridiculise ou nous persécute.

Mais ce n’est pas cela que le Seigneur attend de nous : Ce qu’il nous demande, c’est d’avancer au large. Simon refait exactement ce qu’il a fait toute la nuit sans rien prendre. Mais cette fois, tout est changé car Jésus est à bord. Le bateau coule tellement il est chargé. La pêche miraculeuse, ça ne se fait pas tout seul : c’est une mission de toute l’Église. Mais il faut que Jésus soit à bord. Il doit être là pour commander la manœuvre, donner des ordres et se faire obéir. Il ne suffit pas d’avoir des plans bien élaborés ni d’utiliser les techniques les plus modernes. Le plus important c’est de jeter les filets et de la faire avec foi « sur sa parole ». La pêche miraculeuse, c’est lui qui s’en charge. Le principal travail, c’est lui qui le fait dans le cœur de ceux et celles à qui nous annonçons la Parole.

Comme Pierre, nous sommes tous appelés par le Seigneur. Il compte sur nous pour une mission bien précise. Il ne s’adresse pas nécessairement aux meilleurs ni aux plus saints. Il n’appelle pas « que les enfants sages. » Il peut venir nous chercher très loin et très bas. Les grands témoins de la foi sont des pécheurs pardonnés. Son appel est toujours le même : « Avance au large et jetez vos filets. » Avec ce qui est petit et faible, le Seigneur peut faire des grandes choses. L’important c’est d’être AVEC le Seigneur.

Jésus guérit un lépreux (12-16)
Cet épisode nous montre la victoire de Jésus sur l’impureté par excellence. La lèpre était une affreuse punition divine. Seule une intervention exceptionnelle de Dieu pouvait la guérir. La foi du lépreux était manifeste. Il reconnaît en Jésus le pouvoir de guérir. Par son attitude, il reconnaît Jésus comme Seigneur. Cette foi lui vaut le salut et la purification de sa lèpre.

Qu’est-ce que cela peut bien signifier dans notre vie d’aujourd’hui ? La lèpre, c’est le péché de notre cœur. Seul le Seigneur peut nous guérir, à condition que comme le lépreux, nous nous approchions de lui en toute vérité, en toute humilité. Cela se fait dans le sacrement de la confession, où le prêtre, au nom du Seigneur nous pardonne nos péchés et nous rétablit dans la communion de l’Église.

Puissions-nous reconnaitre la lèpre qui est dans notre cœur et nous avancer vers le Seigneur dans la même confiance et humilité que le lépreux de cet évangile.

Jésus guérit un paralysé (17-26)
Jésus est envoyé par le Père pour porter la bonne nouvelle du Royaume de Dieu. Dans la maison où il se trouve il y a tellement de monde qu’on ne peut plus se frayer un chemin pour accéder à Jésus. Arrivent des gens qui veulent lui amener un homme paralysé. Luc nous raconte le stratagème qu’ils utilisent : ils montent sur la terrasse, découvrent une partie du toit et laissent descendre le paralysé devant lui.

La foi que Jésus met en avant n’est pas celle du paralysé mais de celle des porteurs. C’est grâce à eux que cet homme est sauvé. C’est important aussi pour nous : quand le prêtre est appelé pour donner le sacrement des malades à une personne éprouvée par la maladie, cette dernière n’est pas toujours consciente. Bien souvent, elle n’est pas en état de comprendre ce qui se passe. Mais le plus important c’est l’attitude de l’entourage. C’est la foi et la prière des porteurs qui sauve le malade. Leur mission, notre mission à tous, c’est de l’amener à Jésus.

Si Jésus commence par donner le pardon c’est parce que le péché est le premier de tous les malheurs. Le premier mal de cet infirme ce n’est pas d’être immobilisé par sa paralysie. Le plus grave c’est d’être cloué dans son mal intérieur. C’est vrai aussi pour chacun de nous. Nous pouvons être paralysés par la rancune, l’égoïsme, l’orgueil. Nous devenons alors incapables d’aller vers les autres, incapables d’aimer, de partager, de pardonner. Un geste de paix nous libèrerait, mais nous n’y arrivons pas. Oui, une fois ou l’autre, nous nous reconnaissons tous, dans ce paralysé.

Nous pouvons aussi nous reconnaître parmi les porteurs. Il y a, en effet, autour de nous des pécheurs paralysés qui ne peuvent pas se sauver eux-mêmes. C’est dans la prière d’intercession que nous les portons à Jésus. Ne craignons pas de nommer dans notre prière tous ces gens que nous voulons lui présenter. Nous souffrons tous de voir tant de haine, de guerres et de violences dans notre monde. Nous sommes désemparés devant tant de souffrances et de catastrophes. Tout cela, nous le portons dans notre prière et nous le remettons entre les mains du Seigneur. Pour lui, il n’y a pas de situation désespérée. À partir d’un mal, il peut toujours faire surgir un bien.

« Prends ta civière et retourne dans ta maison. » C’est une manière de remettre les choses à leur juste place. Jésus ne veut pas que nous dépendions des objets. C’est eux qui doivent dépendre de nous. Jusque-là, l’homme paralysé était dépendant de son brancard. Désormais, c’est la civière qui est remise entre les mains de l’homme. Cette guérison c’est l’image de ce qui se passe dans le pardon : nous sommes libérés de ce péché qui paralyse notre cœur. Avec toute la communauté chrétienne, nous pouvons nous remettre en marche sur le chemin que le Christ nous a ouvert. Nous devenons disponibles aux appels de l’Esprit Saint. Ce pardon nous rend libres pour aimer Dieu car la santé de l’âme c’est d’abord l’amour de Dieu.

Jésus appelle Lévi (27-32)
Cet évangile nous présente un homme qui a changé de vie et qui a célébré dans la fête ce changement. Lévi était un publicain c’est-à-dire un homme qui collectait les impôts pour l’occupant Romain. C’était à peu près l’équivalent du terme actuel « exploiteur public ». Lévi devait être très riche : il remplissait ses poches sur le dos du peuple avant de remplir les caisses de l’État.

Or c’est cet homme détesté de tous que Jésus a appelé à le suivre. Il ose choisir comme apôtre un de ces pécheurs mal vus. Il l’appelle à changer de vie. Et il le croit capable de changer. Il lui fait confiance. Est-ce que je donne toutes ses chances à tout homme ? Est-ce que je crois en ma propre possibilité de conversion ?

« Alors, Lévi, quittant tout, se leva et se mit à le suivre. » Tout quitter pour suivre Jésus. C’est vrai aussi pour nous. Si nous voulons suivre le Christ, il nous faut renoncer à certaines choses. Il nous faut prendre conscience de ce qui nous empêche de le suivre vraiment. Le Carême est un temps de purification, d’allègement. Larguer tout ce qui m’encombre, me concentrer sur l’essentiel.

« Il lui offrit un banquet dans sa maison, et il y avait une grande foule de publicains et de gens divers attablés avec les disciples. » Voici un exemple de renoncement joyeux. Lévi quitte tout pour suivre Jésus mais cela ne le rend pas spécialement morose. Il offre un banquet pour célébrer ce grand renoncement à tout. Il fête sa conversion et sa vocation. Pour lui c’est un nouveau départ.

Les pharisiens et leurs scribes récriminaient… Ils passent leur temps à cela, à récriminer, à gémir et à déplorer. L’essentiel de leur religion était de se préserver, de se séparer, de juger de loin et de haut… »Ce ne sont pas les bien-portants qui ont besoin du médecin mais les mal portants. Je ne suis pas venu appeler les justes à la conversion mais les pécheurs… »

Voilà une bonne nouvelle pour les pécheurs que nous sommes. Le Seigneur nous offre à tous une chance de conversion et de retour à lui. Trop souvent, nous résistons à ses appels. Nous ressentons douloureusement nos limites. Arriverons-nous à faire un Carême meilleur. Je compte sur toi, Seigneur. Ma volonté a besoin d’être guérie.

Jésus et le Jeûne
Certaines gens (des scribes et des pharisiens) reprochent aux disciples de Jésus de ne pas observer certaines règles, en particulier celles qui concernent le jeûne et la prière. Jésus leur répond que les invités à une noce ne peuvent jeûner pendant que l’époux est avec eux. L’époux en question c’est Jésus lui-même. Pendant qu’il vit avec ses disciples, il ne convient pas que ces derniers se mettent à jeûner

En venant sur terre, Jésus a inauguré un monde nouveau ; il a fait toutes choses nouvelles. Il a littéralement renouvelé le monde ; il l’a mis en fête éternelle. Il n’a pas fait que mettre du vin neuf dans de vieilles outres ou rapiécer un vieux vêtement avec un tissu neuf. Il a conclu avec le monde une alliance nouvelle et éternelle ; il affirme ainsi l’amour immense et toujours fidèle de Dieu en nous invitant dans sa fête pleinement.

Cette terre nouvelle, cette fête totale, nous est acquise particulièrement par la mort et la résurrection du Seigneur. Même si cette transformation n’apparaît pas encore, elle est déjà bien présente par tout le bien qui se produit dans le monde grâce à nos efforts. Ce bien prend sa racine dans l’amour éternel du Père pour nous. Avec Jésus, c’est vraiment un nouveau départ.